Aujourd’hui, nous partons à la rencontre d’Alexis, 22 ans, qui vient de rallier Paris depuis Budapest, 1962 km à vélo.

Alexis est un ami, cycliste à ses heures, qui termine ses études en Finance. Quand il vit l’été arriver, une de ses dernières vacances de plusieurs mois avant de rentrer dans la vie active, il lui vint une idée.

Il voulait faire quelque chose de différent. Un truc dont il se souviendrait. Il décida de se lancer ce défi :  rallier ces deux capitales, seul, sans aide extérieure… et sans grande préparation.

Il nous raconte son périple.

Philippe : Alexis, peux-tu nous décrire ton itinéraire en quelques mots ?

Je suis parti en train jusqu’à Zurich, avec mes bagages et mon vélo emballé dans une housse souple. Jusque-là, rien que de très classique. 

Puis, changement de décor. Je suis monté dans un train de nuit, rempli de jeunes qui baroudaient à travers l’Europe. Allemand, belges hollandais, italiens, polonais, et j’en oublie, échangeaient sur leurs destinations et leurs aventures. Une ambiance de road trip. Je suis arrivé à Budapest sans avoir beaucoup dormi, mais j’étais déjà gonflé à bloc.

Et de Budapest, tu te mets donc en route….

Oui. J’ai d’abord rallié Bratislava (Slovaquie), puis Vienne (Autriche). En 3 étapes je venais déjà de poser mes roues dans 3 pays.

Je me suis ensuite dirigé vers Weissenkirchen, au milieu des vignes, Obermühl, dans un paysage de montagnes.

Puis vint l’Allemagne avec Straubing, toujours le long du Danube, Neubourg (au nord de Munich), Ulm, Radolfzell (au bord du lac de Constance). J’ai ensuite longé le Rhin jusqu’à Bâle et je suis arrivé en France.

J’ai alors traversé Belfort, Ronchamp, Vittel, Neufchâteau, Chalon en Champagne et enfin, Paris.

Combien d’étapes as-tu réalisées ?

Je ne suis pas un habitué des longues distances, alors, j’ai pris mon temps. Je ne voulais pas faire de grosses étapes. J’avais prévu au départ des étapes de 80 à 100km, 120 au maximum.

Le problème, c’est qu’en partant à 9h, j’arrivais dans ma ville étape à 15h, sans avoir grand-chose à y faire. J’ai donc allongé un peu mes distances quotidiennes. Jusqu’à 180km pour la plus longue. Et il m’a fallu 14 étapes. 

Comment t’est venue cette idée ?

Je finissais mon master et j‘avais devant moi un long été de quatre mois. Un de mes derniers étés. Je voulais marquer le coup, pas juste partir en vacances avec les amis. J’ai réfléchi autour de la randonnée, réaliser un itinéraire me plaisait bien.   Assez naturellement l’idée du vélo s’est imposée à moi.

Je ne tenais pas particulièrement à le faire seul au départ. J’ai cherché des amis. Mais impossible de trouver un créneau qui convenait à tous.  Et, le faire seul pimentait un peu plus mon défi.

J’ai alors cherché des destinations. Je me suis rendu compte qu’il existait l’Eurovélo 6. Un itinéraire qui relie l’Atlantique à la Mer Noire. C’était plus qu’il ne m‘en fallait (!). Il n’est pas toujours fait de pistes cyclables, pas toujours clairement balisé, mais j’avais au moins une route à suivre.  

Comment as-tu fait ton itinéraire ?

Je l’ai récupéré auprès de quelqu’un qui l’avait posté sur les réseaux sociaux. Peut-être y avait-il quelques approximations, soit dans l’Eurovélo 6 soit dans l’itinéraire que j’ai récupéré. L’itinéraire était par moment un peu compliqué. En Autriche, je me suis parfois engagé sur des chemins de terre.

Quel matériel as-tu utilisé ?

J’ai roulé avec un vélo route, un Scott de 2007. Je l’avais équipé de sacoches Apidura. Une de 14 litres à l’arrière où je logeais toutes mes tenues. Une à l’avant, de même volume où je mettais mon matériel de camping, avec, au-dessus, ma tente. Je n’avais pas pris de sac à dos, ce qui m’a permis d’avoir le sentiment de voyager léger. J’avais aussi fixé une sacoche de 5 litres sur le cadre pour stocker du petit matériel (chambres, pompes, kit de réparation et, bien sûr, mes barres énergétiques pour les moments difficiles).

Justement, comment as-tu géré l’alimentation et ton hébergement ?

Je m’arrêtais dans les boulangeries le matin. Le midi, je m’arrêtais pour prendre un petit snack dans un resto de bord de route. Le soir, je cherchais un resto un peu plus sympa avant d’aller au lit.

Quant à l’hébergement, je n’avais rien réservé à l’avance. Je  me mettais en quête d’un hôtel au moment où j’arrivais dans une ville. D’ailleurs, en arrivant à Obermühl, je me rendis à l’office de tourisme. Je leur demande de m’indiquer quelques endroits simples pour passer la nuit. On m’a alors indiqué les  hôtels ouverts, avec le nombre de chambres disponibles. Je n’avais plus qu’à faire mon choix !

Quels sont les imprévus que tu as dû gérer ?

Ça a commencé très fort. Dès le premier jour, à proximité de la frontière entre la Hongrie  et la Slovénie, mon itinéraire m’emmène sur une voie de chemin de fer avec, quelques centaines de mètres : un pont. Je fais demi-tour et je commence à chercher mon chemin. Je comprends vite qu’à moins de faire un long détour, il me fallait franchir cette rivière via ce pont.

Heureusement, la voie de chemin de fer est double, et une des voies est en herbe. Visiblement désaffectée. Je m’y engage. Malheureusement, cette voie se termine à l’approche du pont et il ne reste plus que la seconde, manifestement utilisée. Je m’apprête à faire demi-tour. Mon premier jour va-t-il se terminer par un long détour de dernière minute ?… Je trouve finalement un passage sur ce pont. Je l’emprunte en pressant le pas. Me voici de l’autre côté. Ouf.

As-tu rencontré beaucoup de monde durant ton parcours ?

Beaucoup moins que je ne le pensais au départ. A Vienne j’ai roulé pendant une heure avec quelqu’un qui faisait sa sortie du dimanche. Plus tard, avec un Allemand qui faisait le tour du lac de Constance, on a même bu une bière ensemble et discuté pendant deux heures, très sympa.

Et …finalement ce fut tout. Bien sûr, chaque soirée était l’occasion de discuter avec mes hôtes qui étaient toujours curieux de savoir ce que je faisais.

Qu’est-ce qui a été le plus dur ?

Clairement, le début. Non pas l’aspect sportif, mais le mental.

Je suis à Bratislava, je pense mettre trois semaines avant de rentrer chez moi (finalement il ne m’a fallu que 14 jours). Cette fois, je réalise que je vais affronter cet itinéraire en solitaire. Je tente de me consoler à Vienne avec une escalope viennoise… que je déguste seul et en silence.

Mais après tout, se retrouver face à moi-même faisait aussi partie de ce que je recherchais dans cette aventure.

Qu’est ce qui t’a aidé à tenir ?

Je peux remercier Facetime pour les échanges avec ma copine, mes parents, mes grands-parents… et à tous les gens que j’ai rencontrés pour quelques instants.

Et puis je n’ai pas regretté cette petite astuce qui a consisté à faire l’aller en train, de partir de Budapest pour rentrer ensuite à vélo. Chaque tour de pédale me rapprochait ainsi de la maison. Aucune tentation de faire demi-tour !

T’étais-tu entrainé particulièrement ?

Et bien … pas du tout (rires).

 J’étais en bonne forme physique. Toute l’année, j’ai fait beaucoup de course à pied. J’ai un niveau correct pour quelqu’un de mon âge. Mais dans la mesure où l’idée de ce raid ne m’est venue qu’au dernier moment, je n’ai pas eu le loisir de m’entrainer spécifiquement.

Au vu du profil de mon parcours, des distances réalisées chaque jour, cela ne m’a pas paru critique.

Mais je roulais de manière très souple. Je faisais souvent des pauses. Chaque fois que j’ai pu en profiter, je me suis baigné dans le Danube. Les kilomètres défilent alors très vite, sans la sensation de faire un effort physique de fou.

C’est sans doute lié que fait que mon itinéraire était plat. J’ai évité la Forêt Noire et les Vosges. Avec si peu de dénivelé, les kilomètres s’avalent facilement et ne sont pas très fatigants… à condition de ne pas avoir de vent de face. Je me suis même payé le luxe de rouler vent dans le dos sur 130 des 180 km de ma dernière étape.

Et si c’était à refaire ?

Je referai tout, complètement différemment. Je rechercherai un itinéraire plus sauvage, loin des routes circulantes et des zones d’activités à traverser. J’aimerais faire une semaine en autonomie complète, rouler sur des chemins, traverser des forêts, dormir sous la tente. Le tout en Gravel bien sûr. 

Si tu devais donner un conseil à ceux qui voudraient t’imiter ?

J’ai fait cette randonnée avec de petites économies et j’ai souvent pris le premier hôtel pas trop cher. Or en prévoyant mieux, j’aurais pu trouver des hôtels plus sympas, sans y mettre une fortune… Il faut beaucoup mieux prévoir les villes où on va s’arrêter.

Merci, Alexis, bonne continuation à toi, bonnes routes !

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